Tribune Libre de l’Opinion # 10 avril 2017
Associer ces trois mots semble une gageure. Et pourtant c’est le pari que SoL France, la Société pour l’organisation apprenante et le think-tank Synopia ont pris devant une centaine de fonctionnaires et de cadres d’entreprises. Comment marier les mots apprenance et gouvernance publique ? Comment insuffler l’esprit start-up au monde politique ? Le pari était moins grand qu’il ne paraissait.
Tant au niveau étatique qu’au niveau régional et local, des « histoires apprenantes » ont montré sur le terrain la profonde métamorphose de notre société (1) : la démarche inclusive de la COP21 puisant une partie de son énergie dans la rencontre avec la société civile était reprise par des expériences vivantes de quartiers et de villes, Humanicité à Lille ou Kingersheim en Alsace par exemple (2), par des recherches innovatives d’entreprises, par des expériences administratives dans le Val-d’Oise, le concept de « delivery unit », la création du chèque emploi-service…
Pas de hiérarchie. L’esprit start-up était présent : pas de hiérarchie, laisser monter les innovations de la base, agir en transdisciplinarité, faire confiance, responsabiliser. De ces défis quotidiens, de ces expériences venant de toute la France, une prise de conscience personnelle et une vision partagée sont nées qui étaient les mêmes dans les cercles de l’administration, des entreprises, ou des associations. Comment créer la dynamique, permettre au fonctionnaire d’être acteur de bien-être et de progrès. Des mots-clés sont apparus qui résonnent comme un appel au monde politique traditionnel.
La démarche en intelligence collective a permis et permet de faire éclater ces mots comme un feu d’artifice à travers le pays. Des mots fondateurs, et des mots de l’action : des accélérateurs, des boosters de la gouvernance de demain. Quatre postures fondatrices : humanisme et personnalisme, recherche du bien commun, écoute, discernement. Dix voies pour l’action : gouvernance catalytique, participation, hybridation, auto-organisation, inclusion, rôle du féminin, stratégie tâtonnante, expérimenter, passer du ou au et, laisser du temps au temps.
Derrière ces mots, il y a du savoir-être, du savoir-faire, de l’énergie : un gouvernant catalyseur, c’est celui qui laisse monter les innovations et met la cohérence. Participation : les personnes-citoyennes ne veulent plus être représentées, elles veulent être partie prenante dans les prises d’orientation. Hybridation est un des mots-clés de la métamorphose, des collectifs inattendus alliant, souvent localement, des pouvoirs publics, des entreprises, des associations, surgissent partout, ils créent des « tiers lieux » (3) d’où l’innovation jaillit. Etre stratège et tâtonner est un oxymore, c’est savoir créer une vision partagée et chercher comment la mettre en œuvre.
C’est la France positive, c’est, il faut l’espérer, la France de demain. Que les politiques l’entendent !
Irène Dupoux-Couturier est vice-présidente de SoL France.
(1) : Alain de Vulpian, Eloge de la métamorphose, en marche vers une nouvelle humanité
(2) : Joseph Spiegel, Et si on prenait – enfin ! – les électeurs au sérieux, Temps Présent, 2017
(3) : Pierre Giorgini, Le crépuscule des lieux, Bayard 2016
L’administration publique est encadrée par tellement de règles, de contraintes, de rigidités qu’on ne l’imagine pas à la pointe de l’évolution. Et pourtant, elle y est – qu’elle le veuille ou non, parce qu’elle est par définition au contact de l’ensemble de la population, des contraintes, des complexités.
En France, le haut niveau des cadres de la fonction publique ouvre des opportunités. J’ai la chance d’intervenir auprès de plusieurs services, dans l’élaboration participative de projets managériaux. J’ y emploie des mots très ordinaires, des mots du quotidien, leurs mots. Mais derrière cette réserve ou discrétion, une constante : partout on aspire à produire du sens, à nourrir la convivialité et les tissus relationnels, à faciliter le développement de chacun.
Il nous manque encore quelques paroles d’inspiration, quelques actes forts – concernant par exemple les rigidités corporatistes – , et du temps.. mais ine « administration heureuse », c’est possible.
Petite publicité, mon article récent sur les projets participatifs d’entité : http://www.ponty.fr/reussir-son-projet-dentreprise-participatif/
Merci de votre commentaire post-publication de cet article, un an plus tard nous souhaiterions faire un « mapping » de ce qui se passe: les thèmes, les projets, les lieux. Une nouvelle administration qui peut s’éveiller à travers les collectifs hybrides: pouvoirs publics locaux, entreprises, associations…
Si vous voulez y participer ou nous envoyer des exemples, merci,
Irène Dupoux-Couturier